Chapitre I – Dans la présence de l’inconnu passé

« Créateur mon frère, l’absolu n’est pas à la portée de l’homme ;mais dans le coeur de l’homme. » Daniel Pons, Le Fou et le Créateur

Je vous écris d’un pays lointain. Ce n’est ni la distance ni le temps qui le rendent éloigné mais la réalité de sa géographie voilée. Ce pays vit dans une proximité inconnue.C’est un pays proche, tout proche, un pays endormi depuis si longtemps que nous en avons oublié son existence.Un pays de rencontre. Un pays où les hommes parlent aux dieux et les dieux répondent aux hommes. Un pays où l’on communique de cœur à cœur.Il y a le ciel où règnent les dieux. Il y a la Terre où vivent les hommes. Il y a un troisième monde d’entre-deux, ce continent endormi, où tout se joue dans la discrétion.Là où les dieux jouent avec les hommes, et où l’imaginaire de l’homme peut comprendre les dieux. Là où l’âme parle en images. Pays qui n’est pas l’éternel, celui-là est le pays des dieux, celui du ciel. Pays qui n’est pas dans le présent de la routine quotidienne de la terre, celui-là est sur terre.Mais pays qui est la communion des deux, celui de « l’Éternel Présent ».Ce pays lointain gît, au fond de notre coeur endormi souvent depuis des siècles et des siècles. Pays de la « Belle au Bois dormant » de nos coeurs ensablés, où le prince charmant rôde dans nos nuits boisées. Pays étrange à nos yeux embués où le visible et l’invisible sont méconnaissables tant ils se sont unis si discrètement. Pays aux levers de soleil permanents où la matière et l’esprit dansent au rythme érotique et endiablé d’un bouche-à-bouche à nous couper le souffle.Aventurier indocile, vous fréquenterez ici des lieux sans contours. Ceux du pays du centre apaisé qui s’immobilise un instant dans l’infini de nos questions sans réponse. L’indocilité de mes voyages éperdus m’a fait accoster sur ces terres inconnues. Ce continent, que je croyais perdu mais qui n’était qu’endormi et qui par une écoute tendre et un regard aimant s’est éveillé au beau milieu de mes nuits profondes.C’est sous la forme de carnet de voyage que je propose de vous souffler à l’oreille cette aventure, la découverte de ce continent si proche et si lointain, ce continent endormi où vivent nos nuits aventureuses Vous en conviendrez vite, cette démarche n’est pas euclidienne. Elle relève d’une vision de l’espace bien mystérieuse que nous pourrions appeler analogique. Elle est circulaire ou plutôt en circumambulation avec des allers et retours, semblables à ceux d’Isis et de Nephtys, les deux soeurs d’Osiris reconstituant le corps démembré de leur frère. Autrement dit, cette démarche qui peut sembler illogique, ou en désordre est simplement « osirienne », c’est-à-dire morcelée.Il en est ainsi dans ce pays de l’entre-deux, ce pays où la dualité n’a plus de sens, ce pays de l’unité dévoilée. C’est le territoire de la rencontre avec le mystère et de l’union avec la création permanente.Seul le cœur à l’écoute permettra une reconstruction.Mais nous oublions d’accoster sur ces terres mystérieuses où le verbe agit dans le silence.Allons, à la manœuvre !Tentons l’aventure au Pays du silence bavard !